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Après la prise de parole tranchante du chef triplement étoilé Jacques Marcon contre la loi Duplomb, une vague inédite de mobilisation secoue le monde feutré de la restauration. Des cuisines gastronomiques aux cantines responsables, près de 400 professionnels s’élèvent contre un texte jugé dangereux pour la santé publique, l’environnement et la qualité de l’alimentation.
Présentés comme indispensables à la culture de la betterave par les soutiens de la loi Duplomb, les néonicotinoïdes n’ont pourtant jamais fait partie de l’arsenal de Clément et Élodie, agriculteurs bio dans l’Aisne.
La proposition de loi « Duplomb », qui ouvre la voie à la réautorisation des insecticides tueurs d’abeilles et remet en cause l’indépendance de l’Anses, a été vidée de sa substance les 6 et 7 mai par la commission développement durable de l’Assemblée nationale.
Les populations d’oiseaux vivant dans les milieux agricoles ont décliné de plus de 30 % en deux décennies, en raison notamment de l’usage de pesticides.
Government gave emergency authorisation to a neonicotinoid earlier this year - but says chemical was not needed
Plusieurs études prouvaient déjà leur contribution au déclin massif des insectes. Les néonicotinoïdes seraient également néfastes pour les mammifères comme les lapins et les cerfs, mais aussi les oiseaux.
Des associations de défense de l’environnement ont saisi le Conseil d’Etat pour obtenir la suspension de l’arrêté qui a permis la réintroduction d’insecticides fatals pour les abeilles.
Un néonicotinoïde compte parmi les substances les plus fréquemment retrouvées. Il s’accumule de manière inattendue dans les vers, où il est parfois présent à des taux « faramineux ».
Après l’adoption par les députés, début octobre, de la loi réautorisant l’utilisation des néonicotinoïdes pour protéger la culture de la betterave, Claude Henry, spécialiste du développement durable, dénonce, dans une tribune au « Monde », une agriculture qui contribue significativement à une marche accélérée vers une planète inhospitalière.
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En vérité, le recours aux néonicotinoïdes est une manifestation extrême de la dérive d’une forme d’agriculture qui a substitué la chimie à la fertilité des sols, à l’alliance avec la biodiversité et à la variété des compétences des agriculteurs.
Pour la filière de la betterave, cette année 2020 semble bien être une année noire. Ou plutôt jaune, tant les chiffres de contamination des champs de culture de betteraves sucrières français à la jaunisse sont hauts.
Cette récolte 2020, économiquement périlleuse, a contraint ces dernières semaines la filière et le Ministère de l’Agriculture à proposer un assouplissement législatif en matière d’usage des néonicotinoïdes, dès la prochaine récolte, en 2021 (1).
L’Assemblée nationale doit examiner, le 5 octobre, un projet de loi permettant à la filière betteravière d’avoir de nouveau recours à ce pesticide toxique. Un collectif de plus de 150 personnalités politiques, parmi lesquelles la députée Delphine Batho (Génération Ecologie), le député (EDS) Aurélien Taché ou encore le premier secrétaire du Parti socialiste Olivier Faure, dénonce, dans une tribune au « Monde », une « régression environnementale ».
Un collectif de chercheurs plaide contre les projets de dérogations qui permettraient d’utiliser à nouveau des néonicotinoïdes.
Certes, les abeilles ne butinent pas dans les champs de betteraves. Mais cet argument, utilisé comme élément de langage par le gouvernement, masque une réalité étayée par des centaines de travaux scientifiques récents.
Depuis que les néonicotinoïdes ont été interdits en septembre 2018, aucune solution n’a été trouvée. Le gouvernement doit les autoriser sous conditions jusqu'en 2023.
Le gouvernement a accordé aux betteraviers la possibilité de déroger à l’interdiction des néonicotinoïdes, ces insecticides qui contribuent à la disparition des pollinisateurs. D’après le projet de loi qui sera présenté ce 1er septembre au Conseil national de la transition écologique, la dérogation pourra être demandée pour tout néonicotinoïde... Pourquoi un tel recul alors que 80 % des populations d’insectes ont déjà disparu en Europe ?
Le gouvernement s'est engagé à ouvrir la voie à ces insecticides pour les planteurs de betteraves. Les producteurs de maïs espèrent le même traitement.
Le gouvernement prévoit d'obtenir «une modification législative cet automne» afin de protéger leurs cultures des pucerons verts, vecteurs du virus de la jaunisse.
Le ministère de l’agriculture et de l’alimentation a annoncé le retour des néonicotinoïdes sur la betterave, pour lutter contre une maladie transmise par un puceron.
L’agrochimie refuse de durcir les tests pour protéger les abeilles. Mais son lobbying a été largement rejeté au Parlement ce mercredi.
Dans son livre Et le monde devint silencieux, publié au Seuil le 29 août, le journaliste Stéphane Foucart décortique les manœuvres de l’industrie agroalimentaire pour empêcher, depuis trente ans, toute régulation de ses pesticides dits « systémiques ». Un récit rigoureux et accablant, alors que la responsabilité de ces produits dans la destruction fulgurante des insectes n’est plus à démontrer.